20 avril 2018 Articles de fond
La qualité de vie qu’offre une habitation dépend largement de la qualité de son environnement immédiat. La beauté des bâtiments voisins et la présence d’arbres matures dans la rue, par exemple, peuvent influencer positivement notre milieu de vie. De la même manière, le fait de bénéficier de la lumière naturelle dans sa cuisine ou de pouvoir profiter du soleil sur son balcon et dans sa cour arrière contribuent au bien-être et au plaisir d’être chez soi. L’ensoleillement est donc un élément qui conditionne la qualité de vie d’une habitation.
Le risque de perdre cet atout peut être dérangeant, surtout en considérant qu’il est possible que cela entraîne la diminution de la valeur de notre logement. Dans ce contexte, il n’est pas surprenant que nous soyons préoccupés lorsque des nouvelles constructions ou des agrandissements sont prévus dans notre quartier.
Cour ensoleillée à Arbutus Walk (Vancouver). Source : Vivre en Ville
Le «droit» à l’ensoleillement ?
Il est tout à fait normal de craindre la perte de nos acquis. Il est néanmoins judicieux de se demander où se trouve la limite entre notre «droit» à l’ensoleillement et le «droit» de nos voisins à construire un nouveau bâtiment, à agrandir un bâtiment existant ou même à planter des arbres. Nous souhaiterions pouvoir faire comme bon nous semble sur notre propriété. Dans la réalité, il n’est pas toujours évident de faire ainsi sans avoir d’impact direct sur les terrains des voisins, qui souhaitent eux aussi jouir de leur propriété comme bon leur semble...
Il est donc pertinent de se demander : comment faire pour évaluer ce qui est acceptable ou non en matière d’ensoleillement? Plus largement, comment réussir des projets immobiliers qui permettent d’accueillir plus de logements compte tenu du besoin de limiter l’étalement urbain, sans pour autant nuire à la qualité de vie des milieux habités?
L’impact sur l’ensoleillement… où tracer la ligne?
En ce qui concerne l’ensoleillement, la situation initiale est très variable d’un terrain à l’autre. Dépendamment de l’orientation du terrain (par rapport au nord), de la dimension du bâtiment et de son implantation (par exemple, est-il collé à la rue ou a-t-il une cour avant?), les pièces d’une habitation et les espaces extérieurs reçoivent plus ou moins de lumière du soleil. La période de l’année a également une incidence directe sur les périodes d’ensoleillement et l’angle de la lumière naturelle.
Pour évaluer l’impact d’une construction sur les propriétés voisines, il est possible de mandater des firmes de professionnels pour qu’elles réalisent des études afin d’identifier les espaces qui seront nouvellement ombragés par le nouveau bâtiment ou l’agrandissement. Ces études mesurent également la durée de ces pertes d’ensoleillement et le moment de la journée où elles surviennent (matin, midi, après-midi ou soir), le tout en fonction des saisons.
Simulation de l'ombre causée par un projet de consolidation. Source : Vivre en Ville
Des critères à prévoir au moment de la planification
Les municipalités peuvent, à travers leurs règlements d’urbanisme, exiger des études d’ensoleillement. Évidemment, une nouvelle construction générera nécessairement de l’ombre quelque part. Il ne s’agit donc pas de freiner tous les projets immobiliers, mais bien de déterminer comment les encadrer pour minimiser leur impact sur l’ensoleillement des propriétés avoisinantes. Des critères précis peuvent même être déterminés avec la population lors de l’élaboration de la réglementation pour décider collectivement de ce qui est acceptable et ce qui ne l’est pas.
Gradation des hauteurs dans le secteur King West, à Toronto. Source : Vivre en Ville
Par exemple, il pourrait être déterminé que, au printemps, un minimum de 4 heures d’ensoleillement est garanti à chaque logement, tant sur les fenêtres que dans la cour arrière. Le règlement pourrait aussi spécifier que les nouvelles constructions doivent éviter de projeter de l’ombre sur les parcs et les arrêts d’autobus aux moments de la journée où ils sont le plus susceptibles d’être utilisés. De cette manière, tout le monde jouit des mêmes «droits» et chacun sait à quoi s’attendre lorsqu’il y a un nouveau projet immobilier dans son quartier.
Prévenir, atténuer, profiter
Il n’y a pas de formule magique. Nous pouvons demander à ce que des mesures atténuant la perte d’ensoleillement soient intégrées au projet (par exemple, en optant pour une forme de bâtiment qui réduit l’ombre créée) et, si ce n’est pas possible, nous pouvons demander à ce que le projet immobilier compense autrement cette perte (par exemple, par l’aménagement d’une place publique ensoleillée). Avec une conception réfléchie et bien encadrée, il est tout à fait possible d’offrir à plus de familles le choix d’un quartier mature, avec des bénéfices pour toute la collectivité.